Armelle Chitrit invente ses propres repères sous la forme de ce Kanutshuk — découverte poétique et intercontinentale —, court recueil qui dessine sa trace dans le paysage des mots. Poésie des éléments, ouverte sur les dimensions du ciel, les formes libres de Kanutshuk répondent aux sentiments du poète : « L’écriture non ne palpe pas les sons/ elle en cherche l’unité dans le prolongement de l’âme ». Lire et Lire, Arald, Annecy, juin 2007

Voyageuse, comédienne, Armelle Chitrit habite l’espace, à l’horizontale, à la verticale, en transversale, surprend par ses changements de direction… Nos corps comprennent à peine le repos/ comment peuvent- ils se transformer ?…Comme c’est une conteuse qui s’entend, elle sait faire monter l’attente en jouant de l’anaphore : il y eut un feu pour créer un univers qui prend forme page après page comme l’invisible courrier/de la première quittance. Bien sûr ne pas oublier : biffe biffe/ et taille/ dans le sourire rival des jardins italiques/ souligne entoure/ souligne entoure…

Anne-Lise Blanchard, Verso 130, septembre 2007

« La vraie coupure c’est l’océan, explique-t-elle : pas de rencontre à mi-chemin ; de l’autre bord, il y a cette distance libératoire, cette durée de l’hiver, tout devient plus long, plus loin. Je n’aurais pas eu d’activité artistique complète si je n’étais allée au Québec. Le problème pour un artiste c’est la précarité… l’avantage de l’artiste nomade c’est qu’il s’agrippe à une lumière, à une voix, à un visage, à un paysage, une odeur, à toutes formes d’attachements sensoriels. Ma recherche en écriture va dans ce sens.

»… l’expérience fructueuse des parcours poétiques à travers la ville, avec des gens qui pensaient au départ que la poésie leur était inaccessible, montre que la poésie peut devenir une parole essentielle à partager, une autre manière de parcourir le monde et de le regarder.
»Lapoésiec’estenfinconnaîtrel’inconnu »,conclutlapoétesseenprécisantquelaSuisseetleJurapossèdentune grande « ouverture de maison » ; Incomparable ? Si, comparable à la poésie ! Le Quotidien jurassien, La poétesse qui intègre les Franches Montagnes dans son « chantier identitaire », 9 juin 2007

Kanutshuk dit à l’horizontale la banquise du recueil, sa genèse ou sa terre promise ; le cri silencieux de ce poème humain élevé dans le paysage. Qu’il soit désir ou abri, prends le temps, cher lecteur, de te le mettre en bouche.
Passe-le à ton oreille, cet étranger debout couché; entre-le dans cet œil qui écoute. Ou bien encore, pose toi-même tes cailloux et danse !
Invente un bout du monde, chante ou sers ce volcan de chair.
Veille et que vaille pour monde ce cœur bâti de pierres chaudes et légères.

 

– Hypocrite lecteur, – mon semblable, – mon frère !Entends dans Kanutshuk un peu de bout du monde ; imagine Inuk (homme en langue inuit) et Canut (l’ouvrier de la soie) qui se choquent l’un contre l’autre pour faire du feu, marquer leur attachement ici même, à l’intersection d’une colline en colère et d’une calotte polaire.
Curieuse étymologie ? Ne va pas si loin !Inutshuk semble un cairn, tas de pierres élevé par des explorateurs comme point de repère pour marquer leur passage.
À ceci près qu’Inutshuk pointe une expression délibérément anthropomorphique dans le paysage.